(Washington) Les démocrates ont ouvert la voie mardi à la mise en accusation de Donald Trump au Congrès en approuvant un rapport d’enquête qui, selon eux, contient des «preuves accablantes» de la «conduite inappropriée» du président républicain.  

L’opposition démocrate, forte de sa majorité à la Chambre des représentants, a initié une procédure en destitution contre Donald Trump après avoir découvert qu’il avait demandé à l’Ukraine d’enquêter sur un de ses potentiels adversaires à la présidentielle de 2020.

Pendant deux mois, la commission du Renseignement de la Chambre a mené les investigations, en interrogeant une quinzaine de hauts responsables afin de déterminer si le président avait abusé de ses pouvoirs pour faire pression sur Kiev.  

Elle a conclu, dans son rapport d’enquête dévoilé mardi, qu’il avait «placé ses intérêts personnels et politiques au-dessus des intérêts nationaux, cherché à miner l’intégrité du processus électoral américain et mis en danger la sécurité nationale».

«Les pères fondateurs ont prescrit un remède quand un chef de l’exécutif place ses intérêts personnels au-dessus de ceux du pays : la destitution», ajoutent les auteurs de ce document de 300 pages.

La Maison-Blanche a immédiatement réfuté cette analyse. «L’imposture» de l’enquête en destitution n’a produit «aucune preuve» contre Donald Trump, a déclaré la porte-parole de l’exécutif Stephanie Grisham.

AFP

Stephanie Grisham

«Ce rapport ne reflète rien d’autre que les frustrations» des démocrates, il «se lit comme les divagations d’un blogueur de sous-sol qui s’évertue à prouver quelque chose quand il n’y a clairement rien», a-t-elle ajouté.

«Dangereux»

Donald Trump est dans la tourmente parce qu’il a demandé, lors d’un appel cet été, à son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky de «se pencher» sur le démocrate Joe Biden et les affaires de son fils Hunter en Ukraine.

Selon le rapport d’enquête, il existe des «preuves accablantes» sur le fait qu’il a formulé un donnant-donnant (quid pro quo) pour arriver à ses fins. «Le président a conditionné une invitation à la Maison-Blanche (pour M. Zelensky) et une aide militaire à l’Ukraine à l’annonce d’enquêtes favorables à sa campagne», écrivent ses auteurs.

La Maison-Blanche avait gelé sans explication en juillet près de 400 millions de dollars destinés à ce pays en guerre avec la Russie.  

Il existe des preuves tout aussi évidentes qu’il a «entravé» l’enquête en destitution, en interdisant à plusieurs membres de l’administration de témoigner ou de fournir des documents, mais aussi en cherchant à intimider les témoins, peut-on encore lire dans ce document.

«C’est très dangereux pour un pays d’avoir un président sans éthique, qui croit être au-dessus des lois», a commenté l’élu démocrate Adam Schiff, qui préside la commission du Renseignement. «La question est de savoir ce que le Congrès va faire» sur la base du rapport, a-t-il ajouté.

AP

Adam Schiff a présenté le rapport mardi à la presse.

Sa commission a approuvé mardi soir ce rapport lors d’un vote qui a suivi les lignes partisanes entre démocrates et républicains, avant de le transmettre à la commission judiciaire.

Cette dernière entamera dès mercredi le débat juridique pour déterminer si les faits reprochés au président justifient sa mise en accusation (impeachment).

Quatre juristes détailleront lors d’une audition publique les motifs de destitution cités dans la Constitution des États-Unis : des actes de «trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs».

«Farce»

Ce cadre sera moins propice aux témoignages forts qui ont animé la première phase publique de l’enquête, mais les élus républicains pourraient livrer une bataille médiatique contre ce qu’ils qualifient, comme Donald Trump, de «farce» montée par les démocrates.

Dans leur propre rapport d’enquête, publié lundi soir, ils ont blanchi le président : «Les éléments présentés ne prouvent aucune des accusations des démocrates». 

Comme leurs élus, les Américains sont profondément divisés par la possible mise en accusation de Donald Trump, avec 49% qui la soutiennent et 44% qui y sont opposés, selon une moyenne des sondages établie par RealClearPolitics.  

Forts de leur confortable majorité à la Chambre, les démocrates devraient approuver «l’impeachment» de Donald Trump sans difficulté, si la mise en accusation est bien soumise à un vote.  

Le milliardaire entrerait alors dans les livres d’histoire comme le troisième président américain mis en accusation.  

Mais il est peu probable que Donald Trump soit ensuite destitué au Sénat. Chargée de juger le président, la chambre haute est en effet contrôlée par les républicains qui font bloc autour de leur président.