La Cour pénale internationale serait en voie de lancer des mandats d’arrêt contre des dirigeants d’Israël et de ses forces armées. Pour l’instant, c’est une rumeur que le premier ministre de l’État hébreu, Benyamin Nétanyahou, prend assez au sérieux pour s’y attaquer dans un message vidéo adressé « aux leaders du monde libre » le 30 avril. Et que voilà décortiqué.

« Vous devez entendre ceci pour le croire ! La Cour pénale internationale à La Haye est en train d’envisager la possibilité de lancer des mandats d’arrêt contre des représentants du gouvernement israélien et des responsables militaires en tant que criminels de guerre. »

Pour le moment, la Cour pénale internationale (CPI) n’a pas fait de telle annonce, mais la possibilité que des accusations soient déposées ou qu’un mandat d’arrêt soit délivré ne sort pas de nulle part. Le procureur de la Cour, Karim Khan, un juriste britannique, mène une enquête sur la situation dans les territoires palestiniens depuis son arrivée en poste en 2021. S’il a des motifs raisonnables de croire que des individus ont commis des crimes qui tombent sous la juridiction de la CPI, il peut demander à l’instance de sommer une personne à comparaître ou de lancer un mandat d’arrêt. Parmi les crimes visés par ce tribunal situé à La Haye, on trouve les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et le crime d’agression.

« Ce serait un scandale de proportion historique. Les organes internationaux comme la Cour pénale internationale ont été créés dans la foulée de l’Holocauste commis contre le peuple juif. Ils ont été mis sur pied pour prévenir ce genre d’horreurs, pour prévenir de futurs génocides. »

La Cour pénale internationale, qui est indépendante des Nations unies, n’a vu le jour qu’en 2002. Cela dit, sa création fait suite à plusieurs grands procès qui ont eu lieu à partir de la Seconde Guerre mondiale, comme ceux des dirigeants nazis à Nuremberg. Les ancêtres les plus directs de la CPI sont les tribunaux spéciaux mis sur pied dans les années 1990 pour juger les responsables d’atrocités au Rwanda et en ex-Yougoslavie. Ces expériences ont mené aux négociations du Statut de Rome pour établir un tribunal permanent. À ce jour, 124 pays – dont le Canada – ont accepté d’être assujettis à la juridiction de la Cour. Les États-Unis et Israël ne sont pas du compte.

« Mais aujourd’hui, la Cour internationale tente de mettre Israël au banc des accusés […] alors que nous nous défendons contre des terroristes et des régimes génocidaires – l’Iran, bien sûr – qui travaillent ouvertement pour détruire le seul État juif ».

La CPI ne met pas les pays au banc des accusés. Ce rôle est celui de la Cour internationale de justice (CIJ), qui se trouve également à La Haye. C’est d’ailleurs devant la CIJ que l’Afrique du Sud a lancé une procédure contre I’État d’Israël qu’elle accuse de violer la convention sur le génocide. La Cour pénale de justice, pour sa part, vise des individus – dirigeants, militaires, chefs de milice et autres acteurs – qui sont soupçonnés de commettre des atrocités, d’en avoir donné l’ordre ou d’en être complices. Parmi les personnes qui ont fait l’objet d’un mandat d’arrêt récemment, on trouve le président russe, Vladimir Poutine, pour son rôle présumé dans le transfert illégal d’enfants ukrainiens en Russie. L’ancien président soudanais, Omar el-Béchir, fait l’objet d’un mandat d’arrêt depuis 2009. Ces mandats d’arrêt n’ont jamais été mis à exécution, mais empêchent les personnes visées de se déplacer dans les pays qui tombent sous la coupe de la CPI, note Marina Sharpe, professeure d’études internationales au Collège militaire royal de Saint-Jean. « Elles deviennent en quelque sorte des parias de la communauté internationale », estime l’experte du droit international.

« En ciblant Israël, la Cour pénale internationale ciblerait toutes les démocraties parce qu’elle saperait leur droit inhérent de se défendre contre le terrorisme sauvage et les agressions gratuites. »

La CPI ne limite en rien le droit d’un pays à se défendre, mais ce droit est balisé par le droit international, notamment par les conventions de La Haye et de Genève, qui déterminent le droit de la guerre, mais aussi le droit international humanitaire visant à protéger les victimes des conflits et les civils ne prenant pas part aux combats. Une des principales critiques de la Cour est qu’elle a à ce jour épargné trop souvent les dirigeants des grandes démocraties occidentales.

« De toute évidence, cette menace par la Cour pénale internationale n’est pas une tentative de faire respecter la loi. Israël n’est même pas assujetti à la juridiction de la cour et a un système judiciaire indépendant qui enquête rigoureusement toutes les violations de la loi. »

La Cour a déjà établi qu’elle a compétence sur les territoires palestiniens, qui, par l’intermédiaire des Nations unies, ont ratifié le Statut de Rome en 2015. Les personnes qui commettent des crimes sur le territoire de l’État membre ou qui sont originaires de cet État sont assujetties. En principe donc, autant les dirigeants et les militaires israéliens que les leaders et les combattants du Hamas – qu’ils soient dans la bande de Gaza ou à l’étranger – peuvent faire l’objet d’accusations et d’un mandat d’arrêt. Si une cour nationale traduit en justice les fautifs, elle a préséance sur la CPI.

« Israël s’attend à ce que les leaders du monde libre se tiennent debout contre l’attaque scandaleuse de la Cour pénale internationale contre le droit d’Israël de se défendre. Nous nous attendons à ce qu’ils utilisent tous les moyens à leur disposition pour arrêter cette manœuvre dangereuse. »

L’attaque dans ce cas vient de Benyamin Nétanyahou qui s’en prend à un tribunal qui n’a pas encore annoncé quoi que ce soit. Sans grande surprise, les États-Unis se sont déjà rangés du côté d’Israël, mais leur crédibilité est minée par le fait qu’ils n’ont pas ratifié le Statut de Rome et qu’ils se sont réjouis de voir le président russe visé par un mandat d’arrêt l’an dernier.

« Six mois après le terrible massacre du Hamas du 7 octobre, 80 ans après les horreurs de l’Holocauste, l’État juif appelle les gens décents partout à rejeter ce scandale par la CPI et à vous tenir aux côtés d’Israël alors que nous nous battons contre les barbares du Hamas et de l’Iran et alors que nous travaillons à bâtir un monde plus pacifique. »

Un monde plus pacifique ? Soupir !

Visionner le message de Benyamin Nétanyahou sur X (en anglais, version courte) Visionner la version longue du message de Benyamin Nétanyahou sur X (en anglais)