Le 28 avril, le président Joe Biden livrera son premier discours à la nation devant les deux chambres du Congrès américain. On peut s’attendre à ce qu’il fasse le point sur la gestion de la pandémie, la relance économique en cours, les actions qu’il a posées depuis son investiture et ses priorités pour la prochaine année. Cette allocution coïncide avec la fin des 100 premiers jours de sa présidence.

Ce discours à la nation survient alors que les États-Unis ont enregistré plus de 570 000 décès dus à la pandémie et un taux de chômage de plus de 6 %. Les tensions raciales demeurent vives et la violence par armes à feu continue de dominer l’actualité.

Malgré tout, le président Biden compte à son actif un bilan fort impressionnant quant à la gestion de la crise sanitaire. Jusqu’à maintenant, plus de 200 millions d’Américains ont été vaccinés. C’est bien au-delà de son engagement électoral.

Il a aussi réussi l’exploit de faire adopter par le Congrès son ambitieux plan de relance de 1900 milliards de dollars qui va contribuer, entre autres, à réduire graduellement la pauvreté infantile de près de 40 %.

Malgré l’absence d’appuis des républicains au Congrès, son programme remporte la faveur de l’ensemble des Américains. Incluant des électeurs républicains !

Cela dit, Joe Biden s’est également démarqué de son prédécesseur Donald Trump au chapitre des affaires étrangères. Dès son investiture, il a annoncé le retour de son pays au sein de l’Accord de Paris sur l’environnement et de l’Organisation mondiale de la santé.

Son administration a aussi opté pour le retour du multilatéralisme en matière diplomatique tandis que des sommets importants sur la démocratie et les changements climatiques figurent maintenant à l’ordre du jour.

Le duo Biden-Harris a aussi agi de façon concrète en imposant d’importantes sanctions contre la Russie pour son ingérence dans le processus électoral américain et dans la cybersécurité américaine. C’est sans compter sa mise en garde envers la Chine pour son comportement envers Hong Kong, Taïwan et ce qu’il qualifie de génocide envers la minorité ouïghoure.

Bref, un bilan remarquable pour les 100 premiers jours. Le président Biden a réussi à imposer son style de gouvernance et sa popularité frôle les 55 % auprès de la population.

La fin de la lune de miel

Malgré ce départ prometteur, l’Amérique reste hautement polarisée sur le plan politique et le Parti républicain demeure sous l’influence de Donald Trump. Compte tenu de la faible majorité des démocrates au Congrès, le facteur Trump s’annonce important en vue des élections de mi-mandat de 2022.

De leur côté, les démocrates éprouvent aussi des tensions au sein de leur formation. La question du filibuster (concept d’obstruction au Sénat qui nécessite l’appui de 60 sénateurs sur 100 pour l’adoption de lois importantes) divise les démocrates.

L’aile progressiste souhaite son abolition pour pouvoir imposer son agenda avec 50 sénateurs et l’appui de la vice-présidente Kamala Harris (également présidente du Sénat), et ce, avant les élections de 2022. Le sénateur démocrate Joe Manchin, de la Virginie-Occidentale, s’y oppose fermement. Puisque le Sénat est divisé 50-50, l’appui de Manchin devient incontournable pour éliminer le filibuster.

Ce même sénateur Manchin est aussi réticent à appuyer l’ambitieux programme d’infrastructures de 2000 milliards de dollars que l’administration Biden-Harris souhaite faire adopter durant la présente session.

Comme il veut l’appui de républicains dans le processus d’adoption, Manchin est prêt à certains compromis. Ce qui ne fait pas l’unanimité auprès des collègues de son parti. Sans le soutien de Manchin, ce plan sera difficile à mettre sur les rails.

D’autres enjeux dominent les manchettes ces jours-ci. L’immigration illégale et les problèmes de migration à la frontière avec le Mexique, les tentatives de plusieurs gouverneurs républicains pour rendre plus difficile l’exercice du vote pour des électeurs normalement identifiés au Parti démocrate, et la possible réforme de la Cour suprême viennent compliquer la donne sur l’échiquier politique.

Finalement, les cas de violence par armes à feu continuent de défrayer la chronique régulièrement. Récemment, le président Biden a dû agir par décret pour imposer un contrôle sur l’accès à certaines armes. Ce qui fut cependant considéré comme insuffisant pour régler ce que lui-même qualifie de « honte nationale ».

Vers une présidence de transformation ?

À la suite de ce premier discours devant la Nation, l’administration Biden fera face à des défis imposants. Si le président réussit à faire adopter son plan d’infrastructures (qui inclut des mesures structurantes en matière d’environnement et de santé) en plus de son programme de relance économique récemment entériné, l’Amérique pourrait bien s’en trouver transformée en profondeur sur les plans économique, social et environnemental, et ce, pour des générations à venir.

Certains observateurs comparent déjà Joe Biden au président Franklin D. Roosevelt (1931-1945), qui fut marquant durant la Grande Dépression, et sa mise en place d’un régime de sécurité sociale toujours en vigueur aujourd’hui.

D’autres le comparent au président Lyndon B. Johnson (1963-1968) qui, à la suite de l’assassinat du président John F Kennedy, a réussi à faire adopter des mesures transformatrices sur le plan des droits civiques et de la lutte contre la pauvreté, ainsi que des programmes d’assurance maladie (Medicaid et Medicare) dont les Américains jouissent encore à ce jour.

Bien sûr, il est beaucoup trop tôt pour dresser le bilan historique de Joe Biden, mais ce dernier est loin d’agir comme s’il était un président de transition. Dès son arrivée en poste, il a pris de front les immenses problèmes de son pays et semble déterminé à laisser sa marque pour en faire une présidence de transformation. Et cela, bien au-delà des 100 premiers jours.

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