En réponse au texte de Renaud Brossard, « Industrie aéronautique : nous n’avons pas les moyens d’en faire plus », publié le 19 juillet

La Presse a récemment publié une lettre ouverte signée par Renaud Brossard, directeur Québec de la Fédération canadienne des contribuables. Bien que M. Brossard ait tout à fait droit à son opinion, nous sommes d’avis que les éléments mis de l’avant dans son argumentaire font totalement abstraction de l’importance stratégique et névralgique qu’occupe l’industrie aérospatiale au Québec et au Canada, et ne dresse en rien un portrait juste de la situation.

Il est facile pour M. Brossard de prendre le raccourci de mettre de l’avant les sommes reçues par Bombardier pour justifier son point de vue, tout en omettant de préciser que ce fleuron québécois a investi 27 milliards en 30 ans dans notre économie. Il ne précise pas non plus que si Montréal compte aujourd’hui parmi les trois capitales mondiales de l’aérospatiale, c’est le résultat d’un travail collectif de longue haleine. Un travail collectif de plus de 80 ans que la Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC) ne suffira pas à maintenir en vie.

Mettons les choses au clair : l’industrie aérospatiale ne se résume pas à une seule entreprise et ce secteur est un pilier de l’économie canadienne et de la chaîne d’approvisionnement mondiale. À lui seul, notre secteur génère des revenus de 31 milliards et contribue à hauteur de 25 milliards au PIB du pays chaque année. Il emploie plus de 213 000 Canadiens d’un océan à l’autre et représente des centaines de petites, moyennes et grandes entreprises. Plus de 90 % des firmes manufacturières canadiennes de l’industrie aérospatiale exportent 80 % de leur production. Plus de 1,4 milliard est investi en recherche et développement chaque année par notre secteur, contribuant ainsi à plus du quart de la recherche et développement manufacturier total au Canada.

Si l’industrie s’unit aujourd’hui, c’est parce que l’heure est grave. Il faut investir maintenant pour stopper le recul de notre champion sur la scène internationale.

Faire le choix de ne pas soutenir l’industrie aérospatiale ne sera pas synonyme de préservation de notre économie, bien au contraire. Faire ce choix signifiera sortir de la course.

Des pays comme la France font le choix de l’innovation dans la relance en misant sur un avion à zéro émission. Les États-Unis ont démontré – et continueront à le faire – un soutien sans faille au secteur de la défense, permettant ainsi le développement de technologies de pointe applicables sur des avions commerciaux.

Comment le Canada pourrait-il encore concurrencer s’il ne se positionnait pas rapidement dans cette course à l’innovation ? Comment pourrait-on, sans soutien gouvernemental, retenir une main-d’œuvre hautement spécialisée et éviter un effritement de l’écosystème ?

Nous voyons les autres gouvernements dans le monde soutenir les secteurs stratégiques de leur pays parce qu’ils savent que les exportateurs de produits de haute technologie créeront des emplois et de la richesse pour leurs citoyens. La poignée de nations qui possèdent une industrie aérospatiale tiennent également compte du rapport coûts-avantages et mettent de l’avant des politiques industrielles agressives pour assurer sa croissance. Bien plus que le Canada.

Enfin, s’il est vrai qu’Ottawa a investi 80 milliards avec la SSUC et 21 milliards en soutien aux entreprises de toutes tailles, il est aussi vrai de dire que l’industrie aérospatiale, avec sa contribution de 25 milliards au PIB, a aidé à payer 25 % de la facture d’Ottawa ! En contribuant aux efforts de développement de l’industrie aérospatiale, les Canadiens ne se contentent pas de récupérer leur argent dans sa totalité, mais créent également de la valeur.

Les faits sont clairs : soutenir notre industrie est un investissement rentable pour le Canada.

*M.  Chartrand est membre du conseil d’administration d’Aéro Montréal.

Lisez « Industrie aéronautique : nous n’avons pas les moyens den faire plus »

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