Le Québec est à la croisée des chemins en ce début de relâche scolaire, estiment des experts, préoccupés par la proportion croissante de possibles cas de variants.

« Deux scénarios sont possibles. Soit celui du Royaume-Uni, où le variant a provoqué une troisième vague, soit celui du Danemark, où le variant a été contenu grâce aux mesures sanitaires. C’est maintenant que ça se décide », explique la Dre Nathalie Grandvaux, chercheuse au CHUM et professeure de biochimie à l’Université de Montréal.

Samedi, l’Institut national de santé publique du Québec a rapporté 110 nouveaux cas de variants présumés, pour un total de 984. À l’échelle de la province, 34 cas de variants sont maintenant confirmés, un bond de 6 en 24 heures. Le bilan de la COVID-19 est tout de même demeuré stable au Québec : 858 nouvelles infections et 13 décès supplémentaires ont été enregistrés.

Pour l’instant, nous n’avons pas assez de recul pour savoir quel scénario nous attend. D’un côté, on sait qu’on est en retard sur le nombre de cas de variants réels. D’un autre, la fermeture des écoles pour la relâche élimine au moins un moyen de transmission.

La Dre Nathalie Grandvaux, chercheuse au CHUM

Le virologue et professeur à l’Université du Québec à Montréal Benoit Barbeau reste lui aussi prudent. « On stabilise la courbe, certes, mais on ne le dira jamais assez : ces variants peuvent changer la donne rapidement et soudainement », juge-t-il.

« De toute évidence, le variant britannique prend toute la place. Il est beaucoup plus présent, ce qui veut dire qu’on pourrait voir une augmentation rapide du nombre de cas si ça s’emballe sur le plan de la transmission communautaire », rappelle M. Barbeau.

La bonne nouvelle, dit-il, est que la vaccination progresse rapidement. Le Québec doit en effet recevoir 700 000 doses de vaccin d’ici la fin de mars, à raison de 175 000 par semaine. On attend notamment 400 000 doses du vaccin de Pfizer et 300 000 de celui de Moderna « On va avancer rapidement », a insisté le premier ministre François Legault sur les réseaux sociaux, samedi.

« Heureusement, on est dans une posture où on va pouvoir vacciner beaucoup plus activement, et ça se traduira forcément par une réduction des hospitalisations de cas sévères. Il faut s’en réjouir.

Benoit Barbeau, virologue à l’Université du Québec à Montréal

Finis les rassemblements, implore Legault

Le premier ministre Legault a de nouveau demandé samedi aux Québécois d’« éviter les rassemblements privés » pendant la semaine de relâche, alors que la campagne de vaccination de masse doit être lancée dans de nombreux secteurs lundi.

« On a encore quelques semaines critiques devant nous, surtout à cause de la semaine de relâche et des nouveaux variants, en particulier le B117 [variant britannique]. J’espère que les Québécois vont éviter les rassemblements privés, le temps qu’on vaccine le plus de monde possible », a écrit le chef de la Coalition avenir Québec, dans un message publié sur sa page Facebook, suivant une habitude qu’il a prise depuis quelques semaines déjà.

M. Legault dit voir l’avenir rapproché de manière plus positive. « Ça fait longtemps que je ne me suis pas senti aussi optimiste. […] Vacciner, c’est justement gagner contre la pandémie. Gagner la bataille de notre vie », a-t-il insisté. « En ce début de semaine de relâche, j’invite tous les Québécois à redoubler de prudence. Même si les données sont encourageantes, le virus circule toujours et les cas de variants continuent [d’augmenter] », a aussi tweeté le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé.

Si, dans le reste du Québec, ce sont pour le moment les personnes de 85 ans et plus qui ont accès à la vaccination, le premier ministre promet que son gouvernement « va rapidement vacciner les 70 ans et plus, puis toute la population adulte ». D’ici deux semaines, les autorités espèrent avoir terminé la vaccination chez les 85 ans et plus. L’opération s’étendra ensuite aux groupes d’âge de façon décroissante.

On a vacciné dans tous les CHSLD, où il n’y a presque plus de décès et de personnes gravement malades de la COVID-19. C’est super encourageant.

François Legault, premier ministre du Québec

M. Legault affirme que, dans les deux dernières semaines, des vaccins ont aussi été administrés « dans presque toutes les résidences pour personnes âgées », précisant qu’il faudra attendre environ trois semaines avant que le vaccin ne fasse « pleinement effet ». « On devrait là aussi voir des résultats très positifs vers la mi-mars », a-t-il illustré. Jusqu’ici, 100 000 personnes ont reçu la première dose dans ces résidences, a confirmé vendredi la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais. Dans le réseau, 200 000 travailleurs de la santé ont été vaccinés contre la COVID-19, ce qui fait en sorte que « la pression est moins forte sur eux et sur le système », a conclu François Legault.

Le bilan en détail

Au total, 10 385 personnes ont jusqu’ici succombé à des complications liées à la maladie. Sur 13 décès rapportés samedi, 4 sont survenus dans les Laurentides, 3 à Montréal, 3 en Montérégie, 2 dans la Capitale-Nationale et, enfin, 1 en Outaouais.

Le nombre d’hospitalisations, lui, continue de diminuer. On a enregistré samedi une nouvelle baisse de 21 à ce chapitre. Cependant, 599 patients demeurent hospitalisés au Québec, dont 112 se trouvent toujours aux soins intensifs, soit une baisse de 7 cas en 24 heures.

Du côté de la vaccination, le Québec a enregistré son plus haut chiffre de la semaine au chapitre des doses administrées ; 15 902 d’entre elles ont été données dans la journée de vendredi. Jusqu’ici, 418 399 personnes ont reçu la première dose. Tout près de 4,95 % de la population a été vaccinée à ce stade-ci.

Avec 537 825 doses reçues par le gouvernement jusqu’ici, la province dispose de 119 246 doses en réserve. Enfin, la quantité de prélèvements effectués demeure stable. Jeudi, le Québec a en effet réalisé 28 226 tests de dépistage, ce qui représente néanmoins une certaine baisse par rapport aux trois jours précédents.

Le Québec compte actuellement 773 éclosions toujours actives, ce qui représente une baisse de 24 par rapport à la veille. Plus de 36 % de ces foyers de contamination proviennent des milieux de travail ; 31,6 %, du réseau scolaire ; et 17,7 %, des milieux de vie ou de soins. Les garderies, elles, comptent pour 9,4 % des éclosions encore actives.