Les enseignants sont les mieux placés pour enseigner l'éducation sexuelle aux enfants et aux adolescents, soutient une chercheuse en sexologie, qui estime toutefois qu'ils doivent être bien formés et encadrés.

Dans le cadre de son doctorat à l'Université du Québec à Montréal, Julie Descheneaux se penche sur l'implantation du nouveau programme d'éducation à la sexualité au Québec et sur les pratiques en la matière ailleurs dans le monde. Les professeurs, dit-elle, sont parfaitement capables de transmettre ces connaissances à leurs élèves, à condition d'être épaulés.

« L'éducation à la sexualité doit se faire par les enseignants. Ce sont des pédagogues, des personnes spécialistes en vulgarisation des connaissances. Ce que les données démontrent à l'international, c'est que ce que les jeunes veulent, c'est avoir un lien de confiance avec la personne qui enseigne l'éducation à la sexualité », dit Julie Descheneaux. Elle estime que le Québec est en « rattrapage » par rapport à ce qui se faisait dans les écoles il y a quelques décennies, mais aussi par rapport à ce qui se fait ailleurs dans le monde, notamment en Australie.

Le programme d'éducation sexuelle, qui fait l'objet d'un projet-pilote depuis 2015, est actuellement implanté dans 200 écoles de la province, selon le ministère de l'Éducation. Ce sont les enseignants qui, dans le cadre de leurs cours réguliers, doivent former les élèves à raison d'environ 5 heures par année au primaire et jusqu'à 15 heures au secondaire.

L'adhésion à ce programme se fait école par école, sur une base volontaire. À la suite des allégations d'inconduite et d'agression sexuelles mises au jour cette semaine, le ministre de l'Éducation Sébastien Proulx a exprimé son désir de le rendre obligatoire.

Cette volonté suscite des craintes chez certains professeurs. « C'est beaucoup de pression et de stress d'être responsable de ces questions-là, dit Maxime Vinet-Béland, enseignant au secondaire à la Commission scolaire de Montréal. Au primaire, c'est peut-être plus réaliste. Mais au secondaire, quand on parle de sexualité, on n'est plus dans la théorie. On est dans le vécu, ça fait résonner des choses », dit-il.

LES ENSEIGNANTS LAISSÉS À EUX-MÊMES ?

Maxime Vinet-Béland craint en outre que les enseignants soient laissés à eux-mêmes dans l'implantation de ce programme. « On nous promet des spécialistes, des professionnels. J'ai bien de la difficulté avec cette rhétorique-là. Présentement, j'ai des élèves qui ont besoin de soutien orthophonique, et on me répond qu'on n'a pas les professionnels », dit-il.

Sexologue pour l'organisme lanaudois Le Néo, qui intervient auprès des jeunes dans les écoles, Marie-Élaine de Tilly plaide pour que ce soient des sexologues qui donnent les formations aux élèves.

« Le sujet des agressions sexuelles, par exemple, ça demande de la sensibilité, de trouver les bons mots, dit-elle. Il faut être attentif aux réactions en classe. Souvent, un ou une jeune va se lever et quitter la classe parce que ça lui fait vivre des choses. Souvent, le professeur manque d'outils et de soutien. »