(Montréal) Fernand Daoust, qui a marqué l’histoire du syndicalisme québécois pendant plusieurs décennies en oeuvrant à la FTQ, est décédé à l’âge de 93 ans.

On ignore la cause de la mort, mais on savait Fernand Daoust malade depuis un certain temps.

Le président de la FTQ, Daniel Boyer, écrit dans un communiqué que la mort de M. Daoust l’attriste profondément. Il ajoute qu’il était un homme profondément attachant qui a dédié sa vie à faire du Québec une société moderne, plus juste et plus démocratique, et de la FTQ la grande centrale qu’elle est devenue aujourd’hui.

Le secrétaire général, Denis Bolduc, ajoute que c’est une page importante de l’histoire du Québec et du mouvement syndical qui se tourne avec le départ de Fernand Daoust qui a été, précise-t-il, de tous les combats du Québec moderne.

Dans l’esprit populaire, « le grand Fernand » est indissociable de « Ti-Louis », Louis Laberge, son « acolyte » à la tête de la plus grande centrale syndicale du Québec, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

Sa vie professionnelle a été marquée par deux grandes causes : la défense des travailleurs et la défense de la langue française.

L’action syndicale de Fernand Daoust s’est étendue de 1950 à 1993.

Il est né le 26 octobre 1926 d’un père facteur et d’une mère qui travaillait dans des ateliers de couture. Il a étudié en Sciences économiques et en Relations industrielles à la Faculté des sciences sociales de l’Université de Montréal.

Il a fait ses premières armes au sein du mouvement syndical en 1950, à sa sortie de l’université. Il a d’abord milité au Syndicat des chapeliers, puis au Congrès du travail du Canada.

En 1959, il est devenu conseiller technique au Syndicat des travailleurs des industries pétrolière, chimique et atomique. En 1968, il est devenu directeur québécois du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

En octobre 1964, il a été battu par une seule voix au poste de président de la FTQ par celui qui allait devenir son complice pendant un quart de siècle, Louis Laberge.

Il est devenu secrétaire général de la FTQ en 1969. Il a occupé cette fonction de numéro deux de la FTQ jusqu’en 1991, date à laquelle il est devenu président. À ce titre, il était également vice-président provincial du Congrès du travail du Canada (CTC), la grande centrale pancanadienne.

Dès la création du Fonds de solidarité FTQ en 1983, il avait été nommé premier secrétaire.

Intellectuel nationaliste

Si Louis Laberge, qui est mort en 2002, avait la réputation d’être bouillant, coloré et direct, Fernand Daoust, son bras droit, incarnait l’intellectuel, plus réservé, diplomate, affable.

Fernand Daoust a toujours été très nationaliste, contrairement à Louis Laberge qui a été converti à l’option souverainiste plus tard dans sa carrière.

L’engagement nationaliste de Fernand Daoust remonte à son adolescence, lorsqu’il appartenait aux Jeunesses Laurentiennes, un groupe inspiré de la pensée du chanoine Lionel Groulx.

Son arrivée à la présidence de la FTQ en 1991 a coïncidé avec l’engagement plus évident de la centrale syndicale en faveur de la souveraineté du Québec.

Défenseur du français

En plus des droits des travailleurs, M. Daoust nourrissait une autre passion : la défense de la langue française. Il a souvent jumelé les deux, se battant pour le renforcement du français dans les milieux de travail.

En 1977 d’ailleurs, il devenait membre du conseil d’administration de l’Office de la langue française. Il a aussi été membre du Mouvement Québec français.

Au plan politique, Fernand Daoust appuyait la souveraineté du Québec mais, avant, avait été proche du Nouveau parti démocratique (NPD). Il a même été le président-fondateur du Parti socialiste du Québec, un petit parti politique né de la scission des forces de gauche en 1963 et qui est mort en 1968.

Auparavant, en 1962 et 1963, M. Daoust avait même été candidat pour le NPD au Québec.

Face au CTC

Une des grandes réalisations de Fernand Daoust à la FTQ aura été la négociation d’un statut de « souveraineté-association » entre la FTQ et le CTC.

Cette nouvelle relation entre les deux grandes centrales québécoise et canadienne était devenue nécessaire à la suite d’un « incident » survenu en juin 1992, lors d’un congrès du CTC à Vancouver. Le candidat soutenu par la FTQ pour représenter le Québec à la vice-présidence du CTC avait été défait de justesse lors des élections. La délégation québécoise avait alors claqué la porte.

De longues négociations avaient ensuite mené à l’élaboration d’un nouveau rapport entre la FTQ et le CTC.

Le destin

Le 28 novembre 1995, en plein congrès de la FTQ à Montréal, Fernand Daoust était victime d’un grave accident de voiture, subissant de multiples fractures à une jambe et aux deux bras. En tant que président du conseil d’administration du Fonds de solidarité, il se rendait en taxi à l’aéroport pour s’envoler vers l’Argentine.

Hospitalisé pendant plusieurs semaines et opéré à quelques reprises, il avait ensuite entrepris une longue réadaptation.

Lors de l’assemblée annuelle des actionnaires du Fonds de solidarité, Fernand Daoust avait livré sur vidéo son dernier bilan comme président du conseil d’administration et avait annoncé qu’il ne solliciterait pas de renouvellement de mandat.

En 1998, il avait reçu le titre de Patriote de l’année de la Société Saint-Jean-Baptiste — un titre décerné à une personne qui s’est distinguée dans la défense des intérêts du Québec et des luttes démocratiques des peuples.

Il a également été fait Chevalier de l’Ordre national du Québec en 2001.

La FTQ a fait savoir jeudi que les détails des funérailles de Fernand Daoust seront rendus publics par voie de communiqué plus tard dans la semaine.